Plaidoyer pour l’enseignement agricole public

Le Sgen-CFDT a été reçu en audience au Sénat le 18 Mai 2021 et était représenté par Romain BERTRAND et JF LE CLANCHE. De nombreuses questions (dont les moyens...) portant sur l'enseignement technique et l'enseignement supérieur agronomique, agroalimentaire, vétérinaire et paysager ont été abordées.

Une mission d’information bienvenueenseignement agricole public

Le Sgen-CFDT se félicite de l’organisation de cette mission d’information sur l’enseignement agricole, en effet l’ensemble des personnels des établissements PUBLICS techniques et supérieurs sont très attachés à leurs structures et aux missions qui leur confie le code rural.

La confédération CFDT est le premier syndicat français et le Sgen-CFDT déjà  majoritaire dans l’enseignement supérieur, gagne du terrain dans l’enseignement technique et est présent dans toutes les instances nationales de dialogue social du ministère de l’Agriculture, CTEA, CNEA, Cneseraav, CTM, CHSCTM, CT-Formo, CT-AS, etcetera.

L’enseignement agricole à la croisée de multiples défis

Nous sommes persuadés que la pépite dont parlent les ministres en charge de l’agriculture depuis quelques années pour qualifier l’enseignement agricole brille toujours aussi fort sur les territoires si petits soient-ils et mérite une attention particulière eu égard aux défis multiples de notre société et face à la demande sociétale croissante.

Les défis de l’École de la République sont nombreux, car les lycées agricoles sont avant tout ceux de la République, nous devons disposer des moyens nécessaires pour que l’égalité entre les apprenants, la couverture territoriale des formations, options, spécialités soient garanties. Nous devons réfléchir à des coopérations intelligentes et équilibrées avec le ministère de l’Éducation Nationale et du MESRI. À titre d’exemple, comment imaginer que lorsqu’une 2nde Générale et Technologique de l’EA parvient péniblement à un seuil de 24 élèves alors que le lycée voisin de l’EN a des classes à plus de 36 élèves, on préfère ouvrir une énième classe plutôt que de diriger quelques élèves vers un lycée agricole qui dispense cette même 2de GT.

Mieux faire connaitre l’enseignement agricole public

L’École de la République c’est aussi celle qui informe, oriente. Elle permet aux apprenants et à leur famille de choisir des parcours de formation réfléchis, originaux et diversifiés. Il convient que l’enseignement agricole poursuive sa politique de communication et ce, dans le long terme. Nous saluons les moyens déployés pour faire connaître notre pépite. Mais à l’instar d’autres institutions, c’est le temps long qui doit dicter la stratégie. Il faut se défier du « one shot » qui n’aurait d’effet qu’à court terme pour rassurer les politiques en place. Cela nécessite également que les prescripteurs traditionnels de nos formations, les professeurs principaux des collèges, les Psy EN ne considèrent pas les formations professionnelles en général et les formations agricoles en particulier comme réservées aux élèves en difficultés mais comme une réelle voie d’excellence. En effet la qualité de l’accompagnement et les taux d’insertion ne sont plus à démontrer.

Moyens en berne

Les défis de notre société en matière de développement durable et de transition sont croissants. Il convient d’évoquer les politiques publiques que l’enseignement agricole porte comme l’agroécologie avec le plan Enseigner à Produire Autrement, la loi Egalim que nous mettons en œuvre dans les restaurants scolaires, les plans ecophyto et ecoantibio mis en œuvre sur les exploitations agricoles et ateliers technologiques. Il convient tout de même de préciser que régulièrement les établissements répondent présents et de manière volontariste à ces politiques et souvent avec des moyens limités voire en baisse et parfois nul.

La place des Ingénieurs dans les lycées en est un bon exemple. Alors que ces derniers disposaient de temps de décharge afin d’impulser des dynamiques autour de ces politiques, les proviseurs adjoints et adjointes doivent à présent puiser dans leur dotation dite pédagogique pour permettre la continuité de ces missions techniques de valorisation, d’animation du territoire et d’expérimentation, au détriment d’autres missions pédagogiques de face à face ou de pluridisciplinarité. Depuis quelques années, faire des choix sur le déploiement des moyens est mission quotidienne pour les équipes de direction. Mission qui devient presque impossible.

Un contexte administratif peu porteur

Les défis sont nombreux pour notre enseignement agricole PUBLIC. Défis d’autant plus difficiles à relever que les EPLEFPA sont des structures qui jonglent avec des droits du travail, des fiscalités, des réglementations variés quelques fois contradictoires. Le monde concurrentiel dans lequel évoluent nos exploitations, ateliers, centres de formation nécessite inévitablement que nous nous interrogions sur ces structures. Alors que la loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel se met en œuvre, les responsables de ces centres s’interrogent toujours sur l’exigence de sur qualité imposée par le référentiel Qualiformagri. Là encore il faut faire des choix de recrutement alors qu’il existe un besoin de poste à profil pour gérer de manière stratégique ces centres.

Comment imaginer offrir un poste en CDD payé moins de 2000 € à une personne nommée « directrice ou directeur de centre » ? Alors que ces centres ont traversé comme de nombreuses entreprises françaises une crise sanitaire sans précédent, comment imaginer que ces centres soient exclus de mesures telles que le chômage partiel ?

Des questions qui doivent être entendues

De nombreux sujets vont mériter une réponse détaillée au questionnaire transmis, le Sgen-CFDT ne manquera de vous la communiquer. Les sujets qui nous tiennent à cœur, comme par exemple :

  • la précarisation des 1200 ACEN.
  • le manque d’attractivité des emplois de cadre dans l’EA PUBLIC.
  • la proportion importante d’AC dans l’enseignement supérieur.
  • les fusions d’EPL mono-centre, la survie de petits EPL qui pourraient être fusionnés pour éviter leur disparition.
  • le manque de transparence sur le partage des moyens avec l’EA privé.
  • la réforme du bac professionnel.
  • l’avenir de l’ENSFEA.
  • la vétusté des systèmes d’information de la DGER.
  • la place centrale des classes de 4ème.
  • l’ouverture de CAP.
  • l’autonomie des équipes de direction.
  • le mixage des publics etc.

La formation des maitres : un enjeu central

L’enseignement supérieur a de nombreux défis à relever. Le premier, en lien avec l’enseignement technique est d’assurer la formation initiale des maitres (PCEA, PLPA, CPE). L’ENSFEA est l’école de formation dédiée à cette mission. La formation pédagogique des enseignantes et des enseignants est indispensable. Pour penser les transitions dans une perspective citoyenne et des générations à venir, pour juger de l’impact des modes de fonctionnement sur les systèmes sociaux et vivants, il ne suffit plus de juxtaposer les apprentissages disciplinaires. Il faut apprendre à les articuler !

La pluridisciplinarité, cœur de l’identité de l’enseignement agricole permet d’atteindre cette finalité éducative. Enseigner la complexité, mobiliser l’approche pluridisciplinaire ne s’improvise pas, il faut être former pour. L’ENSFEA, le dispositif national d’appui le font pour la formation initiale et continue de ces agents l’EA public. Ainsi l’enseignement agricole aura des enseignant.es outillé.es pour enseigner les transitions, relayer les politiques publiques et former les futurs citoyen.ne.s.

Repenser l’organisation des 11 écoles de l’enseignement supérieur du MAA

Les écoles de l’enseignement PUBLIC supérieur agronomique, agroalimentaire, vétérinaires et paysagers ont un challenge à assurer pour former les futurs cadres. Si leurs moyens ont été globalement maintenus, ceci s’est fait en contrepartie d’un recrutement supplémentaire. Les restructurations en cours sont porteuses de promesses et d’interrogations. L’intégration d’Agroparistech à l’ensemble Paris-Saclay et la création de l’Institut Agro se sont faits sans qu’un bilan objectif des dernières fusions n’ai été réalisé. Un rapport de la cour des comptes assez critique aborde ce sujet.

À côté de ces deux ensembles, quid du devenir des autres petites écoles ? Le Sgen-CFDT demande qu’un débat portant sur l’organisation de l’ESAAV en 2030 soit réalisé. L’ouverture de la possibilité de créer une ou des écoles vétérinaires privées a été votée par le Sénat. Aucun débat n’a eu lieu en amont. Le Sgen-CFDT le réclame. La question de l’installation des vétérinaires, notamment au sein des bassins de production agricole ruraux devra être traitée.

Donner les moyens au SUP pour rayonner

Il convient de conforter ces écoles, de conforter les agents y travaillant et notamment les trop nombreux contractuels, plus de 30%. Pour le Sgen-CFDT, il faut donner les moyens à ces écoles de rayonner sur le plan national et international. Il faut rendre les métiers de l’enseignement et de la recherche plus attractif. Il faut stabiliser les équipes en place, renforcer leurs compétences.

Enfin pour le Sgen-CFDT, l’enseignement agricole (technique, supérieur) doit rester sous la tutelle du MAA. Un point de divergence avec d’autres organisations syndicales.