Europe : formation des enseignants, l’exemple de la Finlande

A la veille des élections européennes, le Sgen-CFDT se penche sur la formation initiale et continue des enseignants en Finlande. Un système singulier, qui laisse une part importante à la recherche et au terrain sans concurrence entre les deux.

formation des enseignants : l'exemple de la FinlandePrésentée souvent comme un modèle, notamment pour ses résultats aux évaluations PISA, la Finlande a depuis longtemps fait le choix de garantir une formation initiale et continue des enseignant·es qui alterne terrain et formation universitaire.

Quelques données générales :

Avec un système éducatif très décentralisé où les municipalités exercent la compétence éducative (dans un cadre national défini cependant), les établissements disposent d’une grande autonomie pour organiser l’enseignement aux élèves. Si le Parlement fixe les grandes orientations en matière d’éducation, le Ministre, quant à lui met en œuvre la politique définie par les parlementaires notamment en terme d’exigences de formation des enseignant·es.

Durant le temps de l’école obligatoire (entre 7 et 16 ans) l’enseignement est dispensé :

  • par un·e enseignant·e généraliste durant les six premières années (primaire)
  • par plusieurs enseignant·es spécialisé·es dans une ou deux matières durant les trois dernières années de scolarité (secondaire)

Une grande liberté pédagogique accordée aux enseignants

Le plus frappant dans le système finlandais est la grande liberté pédagogique accordée aux enseignant·es. Ils, elles, sont en effet considéré·es comme les mieux placé·es pour guider leurs élèves et trouver les solutions pour les faire progresser. Il ne viendrait ainsi à l’idée d’aucun ministre de donner des normes concernant les méthodes de lecture et encore moins de promouvoir un contrôle de ce que les enseignant·es font. A ce titre, les corps d’inspection ont été supprimés il y a une vingtaine d’années. Sou statut de fonctionnaires territoriaux, les enseignant·es doivent aller à la recherche d’une école, d’un établissement qui les rémunérera. C’est le chef d’établissement qui procède au recrutement, par délégation de la municipalité, et c’est l’établissement qui verse leur salaire aux enseignants. Ils, elles seront ainsi dans un premier temps employé·es en CDD, avant d’être titularisé·es par la suite et employé·es sous statut de fonctionnaire en CDI. Leur employeur reste l’établissement dans lequel ils dispensent leur enseignement.

Une formation initiale qui allie terrain et université

La formation de tou·tes les enseignant·es est destinée à satisfaire un double objectif :

  • créer une culture professionnelle commune entre les enseignant·es du primaire et du secondaire
  • élever le niveau de formation des enseignant·es tant du primaire que du secondaire.

Le concours placé à la fin des études secondaires est très sélectif puisque seulement 15 % des candidat·es sont admis·es. Le cursus de formation des enseignant·es est dès lors partagé entre la Faculté de formation des enseignants et la Faculté académique. L’objectif commun est de permettre à l’étudiant·e d’obtenir un Master « sciences de l’éducation », Graal sans lequel il, elle, ne pourra pas enseigner et être titularisé·e. D’autres chemins sont possibles, le système tendant à favoriser les changement d’orientation professionnelle des jeunes.

Formation des enseignants : Entre trois et cinq années

Durant ces années de formation initiale, les enseignant·es seront à même de bénéficier de cours de pédagogie, de connaissance de la psychologie de l’enfant, de méthodologie notamment sur l’interaction entre le maître et l’élève. Les étudiant·es sont à même de faire le choix d’approfondir leurs connaissances dans une matière donnée et ainsi de l’enseigner dans les deux dernières années de l’école fondamentale au même titre que les enseignant·es spécialisé·es. Il s’agit pour les étudiant·es de bénéficier de modélisation de pratiques d’apprentissages possibles. Ils, elles doivent avant tout concentrer leur recherche sur le « comment apprendre à apprendre ». Ils, elles sont également formé·es dès la première année à diagnostiquer des élèves en difficultés d’apprentissage et à adapter leur enseignement. Le Master sera validé par un mémoire de fin d’études basé sur la recherche et les apports didactiques. La pédagogie doit y tenir une place centrale.

Des stages en semi responsabilité

Dès la première année de formation, les étudiant·es désirant devenir enseignant·es sont amené·es à effectuer des stages en établissement scolaire. Durant ces stages placés sous l’autorité d’un·e enseignant·e confirmé·e, ils, elles vont passer de l’observation à la prise en charge de séquences d’enseignement. Les étudiant·es peuvent surtout partager leurs expériences avec l’ensemble des enseignant·es de leur lieu de stage et résoudre en groupe, au sein de l’école, les difficultés rencontrées… Parallèlement, ces temps de « terrain » sont accompagnés d’une réflexion et d’apports théoriques. Ces stages font toujours l’objet d’une évaluation formative et d’une validation.

Ainsi, à l’issue de ces cinq années, 95 % des étudiant·es valident leur diplôme.

Objectif de la formation continue : questionner ses certitudes pédagogiques

La législation finlandaise régissant la formation continue des enseignant·es est inexistante. Ils, elels sont cependant tenu·es de participer à des formations entre un et cinq jours par an. Ces formations, en dehors du temps d’enseignement, sont rémunérées au même titre que les heures devant élèves. De leur côté, les établissements employeurs ont la possibilité d’obliger les enseignant·es à suivre une formation. Les modalités de départ en formation sont définies par une convention collective.

La formation continue des enseignant·es est dispensée par différents centres de formation bénéficiant tous de fonds publics fléchés pour cette mission :

  • université
  • collège de formation des enseignants
  • école de formation des enseignants
  • universités d’été
  • organismes privés
  • entreprises.

Une formation basée sur la volonté de se former des enseignants

L’enseignant·e peut de son propre chef décider de participer à des formations afin de développer ses compétences professionnelles et son expertise. Il peut à ce titre bénéficier d’un soutien des autorités locales et de l’État sous forme de bourses spécifiques. De plus en plus d’employeurs prêtent une attention particulière à ces enseignant·es et peuvent être à même de favoriser la participation à ces formations durant les heures de travail. Le nombre de demandes est cependant très élevé par rapport à la capacité de financement de ces départs en formation. Un·e enseignant·e doit donc souvent attendre plusieurs années avant de pouvoir bénéficier d’un tel programme.

Une formation continue qui doit tenir compte de l’évolution de la société

Ces formations continues visent à adapter les pratiques pédagogiques des enseignant·es à l’égard des problématiques sociétales et des changements : arrivée d’enfants de migrants, développement des outils numériques, par exemple. Mais il s’agit aussi de pouvoir favoriser de façon continue une mise à niveau en matière de recherche pédagogique afin de permettre aux enseignant·es de modifier leurs pratiques. Basée sur des allers-retours entre pratiques et analyses didactiques, la formation continue rencontre un vif succès.

Une formation au centre de la réussite du système finlandais

La formation initiale et continue est en Finlande un élément central de la réussite éducative des élèves. Centrées sur l’élève, sur le partage collectif de pratiques, elles montrent la volonté de ce pays de garantir la possibilité pour les élèves d’atteindre les objectifs nationaux.

Mais c’est avant tout l’autonomie laissée aux équipes qui permet au sein d’un collectif de partager ses réussites et ses échecs professionnels.